PUSSY RIOT
Photo AFP
Une pierre a été élevée devant l’Affabuloscope en signe de solidarité, de soutien et de sympathie envers les Pussy Riot condamnées à deux ans de camp dans ce pays, la Russie, dont le régime poutinien est de plus en plus répressif. En espérant que
Nadejda Tolokonnikova,
Maria Alekhina
Ekaterina Samoutsevitch
continueront d’affuter leur créativité et de faire valoir leur droit à la contestation sans baisser les bras,
même dans l’enfermement,
comme Dostoïevski, en son temps, dans “la maison des morts”.
Symbole et chrisme originaux ©Claudius de Cap Blanc
Jean Dupont de Bellecoste me demandait:
— Quel aurait été selon toi la sanction juste à l’égard des Pussy Riot?
— Une médaille. Et une prime. Et une tournée au Café Pouchkine!
C'est ainsi qu'est venue l'idée d'envoyer une médaille aux Pussy. La principale difficulté étant de trouver une adresse où l'envoi arrivera à destination. On va chercher. Et on va l'envoyer, cette médaille!...
Médaille en porcelaine.
Argile offerte par Laurence Thomas, céramiste; façonnage à l'atelier de métahistoire; cuisson dans le four de Marie Desbrosse, potière au Mas d'Azil. Jean Dupont ira poster le paquet. Si tous les gars et les girls du monde...
Contribution au soutien des Pussy Riot signée Denis Puech:
«LETTRE OUVERTE AUX PUSSY RIOT.
05 10 2012
Chères Pussy Riot,
Je salue votre courage et votre détermination, quand l’Etat russe vous prive aujourd’hui de votre liberté et vous a jeté pour deux ans derrière les murs d’une prison. Je salue votre courage et m’interroge sur les raisons qui font qu’un acte de protestation artistique ait provoqué si dure réaction de la part d’un pouvoir pourtant omnipotent : celui de Vladimir Poutine.
L’accusation de blasphème ne peut expliquer une telle condamnation ; Au plus, une réprobation ou un avertissement pour avoir pu choquer les convictions religieuses de certains de vos concitoyens, ce dont vous vous êtes excusées. Il faut chercher ailleurs les vraies raisons.
La première se situe dans le rapport étroit qui lie depuis des siècles le pouvoir autoritaire avec la religion. Nous sommes ici dans la continuité de l’Histoire russe, au cours de laquelle l’Eglise orthodoxe a toujours soutenu et renforcé le pouvoir autocratique des monarques, tout en profitant de ses largesses. Les Tsars, confrontés aux évolutions de leur temps, se sont appuyés sur l’orthodoxie pour assurer leur domination, et imposer un ordre social qu’ils auraient voulu voir figé par le dogme. D’Yvan IV le Terrible à Alexandre III Romanov, et malgré les tentatives d’ouverture de quelques Tsars comme Pierre le Grand, cette alliance de l’Eglise et de l’autorité impériale a permis de maintenir les populations russes dans un état d’asservissement. Nos autres nations européennes avaient connu même sort jusqu’à leur lent affranchissement à partir du XVIIIème siècle. En Russie, cette combinaison a perduré jusqu’à la révolution de 1917, mais la période soviétique n’a finalement fait que remplacer la foi orthodoxe par une autre idéologie dont elle a dévoyé les fondements. Vladimir Poutine, dont la vision impériale de la « Grande Russie » et de sa propre mission n’a échappé à personne, ne fait que renouer avec la tradition séculaire de l’Histoire russe. Le retour en force de l’Eglise ne peut que conforter son propre pouvoir.
Pussy Riot, vous avez introduit un caillou dans les rouages de ce système bicéphale bien rodé et c’est sans doute la première raison de votre incarcération.
La deuxième raison tient au caractère même de votre acte artistique. Car vous avez créé « une situation » au sens de Guy Debord, que Maria a cité dans le beau texte qu’elle a lu au procès. La « prière contre Poutine » clamée dans vos costumes fluo de punkettes était une création esthétiquement iconoclaste ; elle a claqué sous les dorures de la cathédrale comme une intrusion : l’intrusion d’une expression contemporaine dans l’immobilité d’un temps cyclique – c'est-à-dire refermé sur lui-même. Et ce choc d’une esthétique intrusive dans l’ordre immuable des choses et du temps ne pouvait être perçu par le pouvoir que hautement subversif. Car vous connaissez, bien sûr, le pouvoir de l’art dès lors qu’il est porteur de sens. La faute qu’on reproche à votre acte artistique est d’avoir brisé les codes ! Certains de vos ancêtres russes ont été lourdement condamnés parce qu’ils avaient cru pouvoir modifier les codes esthétiques des icônes. Vous ne les avez pas modifiés, vous les avez bouleversés ! En quelques semaines, ce sont vos cagoules, vos tenues de couleur éclatantes, qui sont devenues des symboles, comme le début paradoxal d’une iconographie de la liberté d’expression. Comment l’ordre autoritaire pouvait-il vous pardonner cette subversion ?
Mais la troisième raison pour laquelle vous avez été condamnées, Pussy Riot, tient à ce que vous représentez un mouvement artistique – politique qui surgit dans la société russe comme l’affirmation positive du désir, au milieu du renoncement généralisé et de la soumission à la boulimie consumériste, à laquelle d’ailleurs, la majorité de vos concitoyens n’a pas accès. Pussy Riot, vous êtes le désir opposé aux « âmes mortes ». C’est Gilles Deleuze qui disait dans l’Anti-Oedipe : « Il n’y a que du désir et du social, rien d’autre. » Vos actions sont le fruit des machines désirantes, une énergie jaillissante, généreuse, créative. Chacune de vos interventions est un coin enfoncé dans les fentes de l’ordre Poutinien ; Elles ouvrent des intervalles où s’engouffrent la vie et la liberté. Vous faites entrevoir un autre monde possible.
Aussi, le plus insupportable pour le pouvoir n’est pas que vous chantiez, dansiez, hurliez, c’est que vous pensez !
Voilà pourquoi vous êtes aujourd’hui enfermées derrière les barreaux d’une prison, voilà pourquoi des milliers de citoyens vous soutiennent dans votre combat. Voilà pourquoi je m’associe à eux et j’admire votre courage et votre force. Je songe à vous, à vos proches, à vos enfants. Aucune grille ne peut arrêter le flot de la liberté.
Denis PUECH
Auteur, peintre, critique.
Maire d’Allières (09)
Auteur de critiques et de romans, dont « Khadan Tadjanovich » aux éditions LNR.
Courriel : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. »
Lettre accompagnée de cette peinture:
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